Un homme, une valise, des lettres
11 mai 2010La Stratégie du Minotaure, d'Elisabeth Rossé. Création au théâtre Koltès à Nanterre du 28 au 30 octobre 2009.
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Le théâtre Bernard-Marie Koltès avant la représentation de La Stratégie du Minotaure".
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Avant la représentation, Philippe Quercy, le père, et Michel Bailet, le clochard, viennent d'arriver.
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Julie Léger, une choreute, Michel Santelli, le père épistolaire, et bientôt, le lever de rideau.
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La troupe est prête à jouer, les acteurs s'encouragent avant d'entrer en scène.
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Le père épistolaire : "Comment se reconnaîtra-t-on ? Je ne suis pas très grand, tu sais. Mes cheveux sont maintenant poivre et sel. Je n’ai plus de barbe - te souviens-tu que j’ai eu de la barbe ? Je porterai une écharpe jaune".
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Le père : " Psstt ! Ma valise ! Ma valise, jeune homme ! Je vais au terminal de bus. Je pars en voyage.".
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Le père épistolaire : "Le mariage, c'est l'entrée des artistes, et la vie à deux le début d'une danse : invitation, regards vers l'autre, yeux clos, regards sur le côté, esquives, pas chassés, la piste est vaste, la nuit est longue...".
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Le père épistolaire : "Mais tu as sans doute pris le temps de voir, de sentir, de comprendre les choses et les gens, et je suis fier de te voir maintenant prendre ta place d'homme."
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Le fils : "Dans ce rêve je suis dans les bras d’un labyrinthe de pierres rouges.(...) Si je sors, je ne verrai jamais ce qu’il y a au centre du labyrinthe. Si je continue, si je m’approche de ce que je pense être un monstre, est-ce que je sortirai jamais ?".
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Le père : "Allez ! Qu'il me porte donc, ce bagage, puisqu'il paraît qu'il peut le faire ! J'aimerais bien, en tout cas, que cela soit possible : direct, Chinatown ! Direct, JFK ! Direct, Paris !".
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Le fils : "Le labyrinthe de mon cauchemar ! Si c’est bien lui, je ne vois qu’une issue possible, celle de la confrontation entre la bête et l’homme, entre mon intuition et ton savoir.".
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Le père : "Je n’allais pas prendre un plan, quand même !" Le fils : "Et dis-moi alors, aurais-tu pris quelque chose qui ne t’appartiendrait pas ?" Le père épistolaire : "(...) Ma vie m’appartient, les quelques bricoles que j’ai mises dans ma valise aussi .".
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Le père : "Bien sûr, ces bus se trouvent dans un des seuls quartiers tarabiscotés de la ville !".
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Le père : "J'avais misé sur le caractère aventurier de ma jeunesse pour me dégourdir les jambes avant le vol. Décidément, les années me rattrapent comme il faut !".
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Le père : "Je suis ici. Parce que je dois être là. Je suis ici. Dans quelques minutes je pourrais être de l'autre côté de cette porte. Me laisser embarquer. Mais peut-être je serai encore là. Ici.".
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Le père : "Quel étalage, cette zone sous douane ! (...) Les désirs braillent lorsque plus rien n'a de prix. C'est bon, ça... comme un bon cigare avant une exécution capitale.".
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Le père : "Elles ont bien dû vous attirer un peu, mes élucubrations, n’est-ce pas ? Les gens s’abreuvent de vérités qu’ils n’osent pas dire eux-mêmes... tout en prenant bien soin d’en alerter la douane afin d’éviter qu'elles ne prolifèrent. On ne sait jamais !"
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La pervenche : "Tiens, vous savez faire ! Félicitations ! Mais ce n’est pas sûr que ce soit autorisé par la loi, ça, de s’immiscer dans un jeu sur la voie publique.".
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La pervenche - s'interposant entre le jongleur et le père et interceptant la balle : "Police ! fini de jouer !". L'homme jeune, sortant de scène : "Et le spectacle continue !".
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Le clochard : "Voyez, je n’suis personne. Je peux mettre n’importe quoi, c’est l’avantage. Et plus je mets n’importe quoi plus je passe inaperçu. Regardez ce costume ! Très classe, hein ? Et ben sur moi i fait pas classe du tout ! Il fait cloche ! Ha ha ha !".
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Le père : "Si je me love en moi, je vois le monde entier défiler en images, se décomposer en pas de danse tribale, en chutes d’étoffes molles et inodores.".
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Le clochard : "Allez, allez, ne te laisse pas abattre comme ça ! Regarde-moi ! Là... c'est ça... regarde-moi dans les yeux... est-ce que tu me vois ? Regarde ! oui... c'est mieux... comme ça...".
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Le clochard : "La promenade n'est pas finie... Tu as encore des tas de choses à raconter... des tas de choses à voir au fond de toi... au fond de moi... à raconter... raconter le monde... Allez !".
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Le fils - relevant doucement son père : "Tu as tué l'animal enchaîné qui nous éloignait depuis si longtemps, qui parasitait notre vie de ses mugissements.".