Le Monstre Lumivore
Pas (trop) rancunière, j'ai essayé de grappiller les quelques miettes qu'il voulait bien me laisser.
Paris, octobre 2009 - mai 2010.
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Il s'est installé sur une autre partie de l'immeuble en juin, puis il a rampé jusque chez moi début septembre.
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Et il est arrivé, l'échafaudage. En contrepartie de la lumière qu'il me vole, il m'offre des ombres et des reflets.
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Les premiers ouvriers sont venus casser le balcon au marteau-piqueur.
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Et j'ai regardé le reflet des belles matinées d'hiver à travers les planches.
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Mon cadeau de Noël est arrivé emballé dans un filet : un splendide coucher de soleil.
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L'immeuble aussi était prêt pour les fêtes : complètement empaqueté. Mais le piège à lumière n'est pas fait pour être ouvert.
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Il intercepte les rayons de soleil, et les débite en tranches avant de les déposer sur ma moquette.
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C'est quand il fait gris qu'il montre son vrai visage, l'échafaudage : sinistre.
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Comme une grosse toile d'araignée, il emprisonne même les flocons.
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C'est la course entre le printemps et les travaux. On arrive aux finitions du balcon : les paillettes, petite touche décorative.
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La dernière couche arrive comme une sentence, et annonce la fin du règne photocide.
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Je ronge mon frein et je profite sans filet, la vue débrouillée dans une fenêtre de limpidité.
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Et puis un matin, soudain, de nouveaux ouvriers sont là. La troisième équipe, après celle du balcon et celle du ravalement. Ils vont démonter l'échafaudage. Ils sont zaïrois.
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La poulie reprend son chant de crécelle métallique géante. Cette fois-ci, il annonce les beaux jours.
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Et le ciel réapparaît, magique. Pour fêter l'évènement, il reflète la couleur du monstre bientôt à terre.